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4 décembre 2011 7 04 /12 /décembre /2011 21:05

 

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L'administration a ses raisons que la raison ne connait pas.

Anonyme


Lundi 29 mars dans la gare d’Asnières sur Seine.

 - Contrôle des billets, s’il vous plaît.

- Je… Je ne l’ai pas…

- Contrôle des billets, s’il vous plaît.

- Je viens de vous dire que je n’ai pas de ticket.

- Très bien, très bien. Vous allez devoir payer une amende.

- J’imagine, oui…

- Vous allez devoir payer une amende.

- Oui, oui… Vous voulez mes papiers, c’est ça ?

- 10000€.

- Pardon ?

- Votre amende. 10000€.

- 10000€ l’amende ??? Vous rigolez ou quoi ???

- 10000€.

- C’est une blague ?

- 10000€.

- Non mais attendez, monsieur. Ce n’est pas sérieux. Je ne peux pas payer cette somme, voyons !

- 10000€.

- C’est quoi ce délire, là ? C’est une caméra cachée ?

- Contrôle des billets, s’il vous plaît.

- Ho, vous le faites exprès ou quoi ? Je l’ai pas mon billet, je vous dis !

- Très bien, très bien. Vous allez devoir payer une amende.

- Dites-moi… Vous êtes complètement con, vous, non ?

 

Même jour à la Mairie d’Asnières sur Seine.

 - C’est l’intégral qu’il me faut, mademoiselle.

- Je viens de vous expliquer à l’instant que je n’ai que ça.

- Vous m’apportez un extrait de naissance. Ce qu’il me faut c’est le document intégral.

- Comment ça intégral ? La mairie ne donne que des extraits.

- Un extrait ce n’est pas pareil.

- Je comprends, mais la mairie ne fournit pas autre chose. Je les ai appelés deux fois, vous pouvez me croire !

- Elle est bizarre votre mairie.

- Peut-être, mais…

- Non, non, elle est vraiment bizarre votre mairie.

- Ok, elle est bizarre. On fait quoi maintenant ?

- Ça ne va pas aller, mademoiselle.

- Écoutez, ça s’appelle comme ça, non ? Un extrait de naissance. D’ailleurs, ça existe, ça, un extrait intégral ? Je ne…

- Mademoiselle, je connais mon métier et je vous dis que cela ne va pas. Vous m’apportez un extrait de naissance alors qu’il me faut le document intégral.

- Appelez la mairie, vous verrez bien ! Ils ne fournissent rien d’autre. Appelez-les !

- Je n’appelle personne. Il me faut l’intégral, c’est une pièce obligatoire pour la constitution du dossier de mariage.

- Mais les informations sur l’extrait vous les avez bien, non ?

- En effet.

- Juridiquement le document que vous tenez est valable, n’est-ce pas ?

- Absolument.

- Alors ? C’est le plus important, non ?

- C’est un extrait de naissance, mademoiselle.

- Je n’ai et je n’aurai rien d’autre. La mairie du 17ème ne me donnera pas autre chose.

- J’ai bien compris mademoiselle. Je ne suis ni sourde ni stupide.

- Alors, quoi ? Je ne peux pas me marier c’est ça ?

- Comprenez-moi bien, mademoiselle. Vous venez m’apporter un extrait de naissance alors qu’il est scrupuleusement indiqué qu’il me faut un inté…

- Un intégral, ça va j’ai compris, merci. Allez, rendez-moi tous mes papiers, je repasserai plus tard et surtout j’irai m’adresser à quelqu’un d’autre.

 

Même jour au Tribunal d’Asnières sur Seine.

 - Peine capitale.

- Je vous demande pardon, votre Honneur ?

- Peine capitale. Dossier suivant.

- Mais… Mais… Allons, votre Honneur…

- Plaît-il ?

- Ce… Ce n’est pas envisageable, voyons…

- Pourquoi donc, cher Maître ?

- Mais… Voyons… Soyons sérieux…

- Je le suis, Maître.

- Arrêtez, mon client n’a brûlé qu’un feu de signalisation.

- C’est exact. Peine capitale.

- Co… Comment ça peine capitale ? C’est-à-dire ?

- Peine de mort. Par décapitation.

- Votre Honneur, je ne comprends pas. Est-ce une plaisanterie ? Un gag ?

- Qu’insinuez-vous, Maître ?

- Mais… Allons… La peine de mort… enfin, voyons… En France… Et… Et on ne décapite plus depuis des siècles !

- C’est bien dommage. Dans ce cas, je vais devoir revoir ma décision.

- Je vous prie, oui.

- Peine de mort. Par écartèlement.

- Non mais…

- Quoi, encore Maître ? Vous commencez sérieusement à me faire chier, vous savez !

- Je… Je ne vous permets pas… Non par exemple…

- N’essayez pas d’influencer les membres du Jury ou je fais évacuer la salle, vous m’entendez ?

- Quel… Quel Jury bon sang ? Nous… nous ne sommes pas en Cour d’Assises !

- Ah oui ? C’est bien dommage… Très bien… Allez, peine capitale par pendaison et on n’en parle plus. Suivant !

- Cette situation est… grotesque… Vous… Vous êtes grotesque… D’ailleurs pourquoi n’est-ce pas le juge Perrault qui préside ce matin ? Vous êtes vraiment magistrat ?… Je ne vous ai jamais vu… D’ailleurs… Qui êtes-vous donc, putain de merde ???

 

Même jour, avenue Victor Hugo à Asnières sur Seine.

 - Vos papiers, je vous prie.

- Que se passe-t-il monsieur l’agent ?

- Rien, je vous demande juste vos papiers.

- Tenez. Il y a un problème ?

- Oui. Votre prénom ?

- Ben, c’est celui marqué sur ma carte d’identité.

- Alban c’est ça votre prénom ?

- Oui. Qu’y a-t-il ?

- Comme c’est étrange.

- Quoi, donc ?

- Rien. Vous êtes en état d’arrestation.

- Hein ?

- Tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous.

- Holà, c’est quoi cette histoire ? Vous m’arrêtez pourquoi ?

- Vitesse excessive.

- Quelle vitesse ? Je suis à pied, putain !

- Justement.

- Justement quoi ?

- Justement.

- Vous arrêtez les piétons ?

- Seulement les suspects.

- Vous débloquez ou quoi ?

- Dites-moi…

- Quoi ?

- Alban…C’est vraiment votre prénom ?

- Oui !

- Vraiment ?

- Oui vraiment, vraiment ! Pourquoi encore ? C’est interdit ça aussi ?

- Alban, ce n’est pas banal et pourtant…

- Pourtant, quoi ?

- Et pourtant quand on met les lettres dans le bon ordre, ça fait : banal. C’est vraiment trop suspect : je vous arrête.

 
Le soir même, dans mon appartement rue des Bourguignons à Asnières sur Seine.

 Comme d’habitude, ma femme et moi dînons tranquillement devant les infos :

« … Les 3 individus qui se sont échappés ce matin de l’établissement psychiatrique, l’Hôpital de Jour 92G02 (Dupont) à Asnières sur Seine, viennent d’être arrêtés il y a quelques minutes. Il s’agit de trois hommes. Les internés, déclarés inoffensifs, ont tout de même importuné plusieurs personnes dans la journée. Après s’être procuré des uniformes, ils se sont fait passer pour des agents du service public. Toutefois, il n’est fait aucun cas de brutalité. Ce sont les propos jugés par les « victimes » comme totalement incohérents et surréalistes qui ont permis de localiser, puis de neutraliser les imposteurs…. »

  - C’est dingue, ça ! s’exclame soudain mon épouse.

- Comment ça ? fis-je interloqué.

- Je comprends mieux pourquoi elle ne comprenait rien l’autre conne ce matin à la mairie.

- De quoi tu parles ?

- Qu’est-ce qu’elle m’a emmerdé avec mon extrait de naissance, tu ne peux pas savoir ! Tout s’explique maintenant !

- Non mais, il…

- Elle n’a pas arrêté de me rabâcher : « il me faut le document intégral, il me faut le document intégral, il me faut… ». Je devenais dingue, je te jure !

- Chérie ?

- En fait, c’était une des cinglés échappés de l’asile, j’en suis certaine ! Une malade mentale, non mais tu te rends comptes ? Ha, quand je te dis que j’ai du bol, moi…

- Olivia ?

- Oui, oui qu’est-ce qu’il y a ?

- Tu n’as pas écouté ce qu’ils ont dit : il s’agit de trois hommes.

- Des hommes ?

- Oui. Les trois dingos, ce sont des gars. Ils viennent de le dire.

- Merde… Ben alors l’employée de la mairie, c’était…

- Ouais, celle-là, c’était une vraie personne du service public… Tiens, s’il te plaît, mon cœur, tu me passes le pain ?

 

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