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8 juillet 2009 3 08 /07 /juillet /2009 22:01

La plupart d’entre nous préfèrent le connu à l’inconnu. Pourtant, écrire sur ce qu’on ne connaît pas, est le plus sûr moyen de développer son imagination. Il faut donc oser tout écrire. On croît que l’idée qui nous paraît saugrenue ou extravagante est souvent la meilleure. Pourtant c’est celle que la plupart du temps nous aurions tendance à écarter.
Souvent, je lis des nouvelles où rien n’apparaît en dehors de la scène vécue par le personnage principal. Comme si le narrateur ne voyait rien de ce qui se passe autour de cette action. Pourtant, c’est parfois le petit détail ajouté qui va donner du piment et maintenir ainsi l’intérêt du lecteur.

Voici un exemple :
Le héros d’une aventure rend visite clandestinement et nuitamment à la « bonne à tout faire » de sa maîtresse. Il monte l’escalier principal d’un château. Normalement rien ne se passe lorsqu’on gravit un escalier, mais l’auteur laissant la bride sur le cou de son imagination tente de surprendre le lecteur de cette façon :

« Il atteignit l’escalier. C’était un de ces ouvrages imposants offrant un palier de repos à chaque demi niveau, sur les murs desquels les propriétaires ont coutume d’exposer les portraits de leurs aïeuls. Sur le deuxième palier, Paulo heurta une immense toile représentant la comtesse Octavine de Restaupieu, arrière-grand-tante de Laure de Restaupieu, actuelle maîtresse des lieux et veuve de son état. « Tu ne peux pas faire attention ? Connard ! » éructa Octavine en crachant son dentier. Paulo, lorsqu’il le voulait, savait parler aux bourges : « Madame, votre propos n’est pas à la hauteur de votre rang ! » répondit-il en refilant les ratiches à la douairière. »

Pardon d’avoir choisi un auteur que je connais bien, mais je n’avais pas l’envie de faire des recherches dans les ouvrages classiques.

Donc, piétinez votre ego, sinon il vous dira presque toujours : « cette idée est absurde, cherche autre chose ! » et ceci uniquement dans le but de vous faire croire que vous manquez d’imagination.

Osez abandonner une idée pour une autre. Si en cours d’écriture votre première idée en induit une autre, abandonner la première, vous pourrez toujours y revenir ensuite. Cette seconde idée peut vous conduire vers une nouvelle piste.

Personnellement, pour ne pas entraver mon imagination, j’écris à la plume comme je pense sans me préoccuper des règles (ortho, grammaire, syntaxe). Ainsi mon esprit peut divaguer à sa guise dans la phase d’écriture en cours (scène, description, dialogue, etc.) sans être perturbé par mes carences techniques. Je corrige plus tard, lorsque je recopie au clavier.
Pour travailler l’imagination, rien de tel que de découvrir ce que l’on écrit. Prenez votre stylo et allez-y, écrivez ce qu’il vous passe par la tête, sans plan préétabli. Petit à petit, les images, les scènes vont « sortir » et ainsi un texte va naître. Reprenez dans ce texte les idées vous paraissant suffisamment originales pour surprendre le lecteur et bâtissez votre intrigue avec.

Un autre truc qui flingue bien aussi notre pouvoir imaginatif : c’est d’écrire en pensant qu’on va être lu et jugé. C’est le meilleur moyen d’y perdre son naturel. Lorsque j’ai tendance à vouloir écrire de manière trop « académique », je relis quelques passages de mon premier roman. Heureusement, il n’a été publié qu’à quelques exemplaires pour la famille !
Il ne faut surtout pas « s’écouter écrire », on y perd sa spontanéité. Et plus tard vous verrez que la spontanéité est pour beaucoup à la base du style personnel. À moins d’être tribun, lorsqu’on doit parler à une assemblée, il faut le faire avec naturel sous peine de bide. Si l’on s’écoute parler, si l’on veut utiliser des tournures et des mots qui ne nous sont pas habituelles, c’est foutu. En écriture c’est exactement la même chose. Les belles phrases, les tournures supers viendront en son temps. Parce qu’elles viendront naturellement, elles seront l’une des récompenses de votre travail.

Et puis, encore une fois, merde à l’ego ! Parce que ce connard, quand j’ai une idée nouvelle, me dit « non pas ça, tu te fourvoies, c’est absurde, pas ou trop original ! » c’est à cet instant qu’il faut être vigilant. Si je l’avais écouté, ce salopard, je n’aurais pas osé faire cracher ses ratiches à une douairière encadrée, dans « Les Deniers de Denise »… et je sais que cette image a fait sourire quelques-uns.

« Ne jamais cesser de tenir dans sa main, la main de l’enfant que l’on était. » (Miguel de Cervantès).
Il n’avait pas tord d’affirmer ça le père de Don Quichotte. N’est-ce pas durant notre enfance que l’on imagine les choses les plus folles ? Si votre âge est plus prêt de la poussette que du corbillard, vous avez probablement encore la fraîcheur d’esprit qui permet de tout oser. Alors servez-vous en ! Par contre, si comme moi vous allez plutôt vers le vieillard égrotant et cacochyme, ne lâchez pas la main de l’enfant que vous étiez. Laissez votre imagination vous raconter des histoires. Ça aussi c’est un bon moyen de la stimuler.

Ne vous laissez pas enfermer dans un plan, dans un scénario. Surtout pour une nouvelle. Vous pourrez le faire plus tard, lorsque vous serez capable d’écrire au fil de la plume. Au début, le scénario tue l’imagination. Laissez aller vos pensées, les idées éclore d’elles-mêmes. C’est souvent en partant d’une idée imprécise et en laissant la bride sur le cou à notre imagination qu’on écrit un bon récit.

L’imagination et la méthode sont antinomiques. Tenter d’ordonner ses idées pendant l’écriture, c’est mettre ses capacités créatives sous l’étouffoir. N’hésitez pas, écrivez, griffonner, il en sortira bien quelque chose que vous pourrez ordonner plus tard. Et pour cela, je vous conseille vivement le papier et la plume. Je sais, c’est difficile pour les plus jeunes. Mais, à moins de savoir taper sans regarder le clavier, vous perdez toute la fluidité de votre idée en cours par la gymnastique de l’œil et, pour les moins rompus, par les hésitations de frappe. Sans compter les erreurs qui vous agacent et que vous êtes tenté de corriger. Là, c’est la cata, foutu le camp l’inspiration ! Il faut se motiver à nouveau pour la retrouver. Et elle est tellement volatile, la garce, que vous risquez de la perdre. Alors que le stylo, lui, glisse tout seul, sans qu’une infime partie de nos précieuses facultés n’aie à se mobiliser pour cela. Après, vous pouvez vous mettre devant la machine et ordonner, corriger, hiérarchiser, agencer ce que vous avez jeté sur le papier. Il est entendu que nous raisonnons ici toujours dans l’optique de favoriser, voire de développer l’imagination. Si vous n’avez pas de problème avec cette sorcière, écrivez avec le moyen que vous préférez. Mais, j’insiste lourdement, les deux, papier et clavier, sont complémentaires. Même Umberto Eco passe de l’un à l’autre… c’est vous dire !

Je pense aussi que la plus grande faveur que l’on puisse faire à notre imagination pour la stimuler, c’est d’écrire pour se faire plaisir. Ne pas vouloir absolument plaire à d’éventuels lecteurs, écrire d’abord pour soi-même. Peut-être avez-vous l’ambition d’être édité un jour ? Ce n’est pas incompatible, mais pour l’instant faites-vous plaisir. Dites-vous bien que ce n’est pas aux autres de dire d’abord si ce que vous avez écrit est bon ou pas. C’est à vous de le dire. Si vous êtes satisfait de votre récit, si en vous-même vous sentez que c’est bon après avoir lu et relu votre œuvre, il y a de bonnes chances que votre texte sera apprécié. Sur Oniris, nous avons la chance d’avoir des lecteurs et des commentateurs. C’est extraordinaire. Mais dites-vous bien encore que ce n’est pas parce qu’un ou même plusieurs commentateurs auront été sévères, que votre récit est à jeter au panier pour autant. Si vous, en toute sincérité, au fond de vous-même, vous avez ressenti une grande satisfaction à la fin de votre dernière relecture, c’est que votre récit est bon. Mais si vous l’avez présenté sans ressentir cette satisfaction et que vous en prenez plein la tronche par les commentateurs, c’est bienfait pour vous ! Il ne fallait pas le proposer ! (Sauf en catégorie apprentissage, évidemment. Bien que…).

Pour clore cette rubrique sur l’imagination, un petit mot sur le style, ce mystère, cet indéfinissable, si j’en crois tout ce qui a été dit à son propos sur le forum. Pourquoi aborder le style ici ? Parce que notre imagination contribue pour beaucoup à sa création. De quoi naît ce que nous imaginons, si ce n’est de notre histoire, de nos sentiments, de nos émotions ? Et de quoi sera fait notre style, si ce n’est de ces mêmes éléments ? Le style vient en laissant parler notre nature personnelle, en étant à l’écoute et en exprimant nos propres sentiments, et surtout pas en tentant d’imiter nos maîtres.

En conclusion, je le répète, faites-vous plaisir. Ma nouvelle « Les deniers de Denise » qui a donné suite aux aventures de Paulo, est née ici et pour Oniris quand j’ai découvert ce fantastique site. Mon style et genre d’écriture ne sont pas du tout ceux de cette nouvelle. Depuis quelques temps, j’avais envie d’écrire quelque chose dans le genre humoristique, c’était l’occasion de le faire en rejoignant les amis oniriens. Dans cette nouvelle, je me suis lâché et… j’ai été agréablement surpris à la lecture des commentaires qui m’ont été faits. J’ai récidivé au point quand même, entre autres scènes de faire une bataille aérienne entre Paulo et le Baron Von Richthofen, lequel se fait bouffer en vol par un ptérosaure ! De faire dire des mauvais alexandrins à un peau-rouge fofolle ! Il faut oser… Je me suis parfois fait rire moi-même en écrivant cette série. La satisfaction de soi-même pour son œuvre, à la seule condition qu’elle soit objective et surtout sincère, c’est un grand pas vers le succès. Mais celui-là, pour l’obtenir, il faut un peu de talent, beaucoup de persévérance, et énormément de travail.

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8 juillet 2009 3 08 /07 /juillet /2009 22:00

Combien possédons-nous de sens, et combien en utilisons-nous dans nos récits ?
Cinq, répondront la plupart, qui sont la vue, l’odorat, le toucher, l’ouïe et le goût. Oui, et comme le dit Bernard Werber, on peut ajouter aux sens physiques les sens psychiques qui sont : l’émotion, l’imagination, l’intuition, la conscience universelle et l’inspiration. « Si on ne vit qu’avec cinq sens physiques, c’est comme si on n’utilisait que les cinq doigts de la main gauche » dit l’écrivain.

Je ne m’étendrais pas sur les sens psychiques, dont parle Werber. Ils font partie de la personnalité de chacun, il vaut mieux les posséder si l’on veut écrire…

Combien de fois ai-je lu ici des récits construits sur une idée originale, où les six principes de base ( http://www.oniris.be/modules/news/article.php?storyid=35) d’une bonne écriture sont respectés, mais qui m’ont laissé au point final une impression d’inachevé simplement parce que l’auteur avait négligé les sens physiques. Certains genres de récits « sans atmosphère » peuvent s’en passer, mais lorsqu’on est débutant, il vaut mieux ne pas les négliger. C’est une bonne habitude. On pense, à cause des impératifs d’une scène, à se servir de la vue et de l’ouïe, ces deux-là on les oublie rarement. Mais pensons-nous aux trois autres sens ?

Voici deux exemples :

Exemple 1

« Elle l’entendit venir derrière elle, se retourna. Trop tard, il était déjà là. Il l’enlaça, écrasa ses lèvres sur les siennes. Elle les mordit pour se débarrasser de l’homme. »
Ici, on ne comprend pas, s’il n’y a pas eu d’antécédents, pourquoi la femme rejette l’homme.

Introduisons un peu de bons sens :

« Derrière elle, un bruit sourd de pas lui parvint. Inquiète, elle se retourna. Trop tard, il était déjà là. Il l’enlaça. Elle sentit le rance de la douzième mauvaise bière qu’il venait d’ingurgiter, tenta de le repousser, mais ses mains glissèrent sur la veste au tissu passé. L’impression d’avoir touché un animal visqueux ajouta à son dégoût. Il écrasa ses lèvres violettes sur les siennes. Elle les mordit pour se débarrasser de l’ignoble ; elles avaient le goût de la pomme pourrie. »

Le bruit sourd des bottes introduit un léger suspens. L’odeur rance de la bière, l’impression de visqueux donnée par le toucher, Les lèvres Violettes, le goût de la pomme pourrie, sont explicites. Le lecteur, et surtout la lectrice si elle n’est pas maso, comprend pourquoi la dame ne veut pas de l’infâme !

Exemple 2

« Elle entendit l’homme venir derrière elle, se retourna. Trop tard, il était déjà là. Il l’enlaça, posa trois petits baisers rapides sur ses lèvres. Elle se laissa aller…"
Ici, le lecteur peut se dire : « elle est facile la donzelle ! »

Si l’on y met quelques sens :

« Les chaussures de cuir de l’homme crissaient sur le sol. Elle l’entendit venir derrière elle, se retourna. Trop tard, il était déjà là. Il l’enlaça, son essence virile la grisa. Elle voulu se dégager mais la douceur de sa veste de lin effaça cette intention. Il posa trois petits baisers rapides sur ses lèvres. Elle se laissa aller… la bouche de l’homme avait le goût et la fraîcheur de la papaye. »(N’insistez pas, vous ne saurez pas la suite !)

Ici, l’odeur essence virile, le toucher douceur du lin, le goût de la papaye, feront plutôt penser au lecteur « la vache, il assure le gus ! ».

Mesdemoiselles, je sais, mon second exemple est un brin macho. Mais vous aimez tellement ça… d’ailleurs, je suis sûr que certaines d’entre vous préfèrent le premier !

Bon, j’y perds le bon sens, je le retrouverai avec Louis dans la prochaine chronique.

L’ouïeVous trouverez dans les dictionnaires de synonymes tout ce qui est propre au différends sons ou bruits.
Par contre pour s’en servir et surtout pour qu’ils viennent à l’esprit au moment où vous en avez besoin, il faut d’abord soi-même savoir écouter.
Écoutez la pluie, le vent, la mer, la ville…
La pluie ne fait pas que floc floc…elle induit d’autres bruits : celui des pneus d’une voiture sur l’asphalte mouillée, des pas dans une flaque, etc.
Le vent ne fait pas que siffler… il brasse les feuilles d’automne, fait claquer un volet, etc.
La ville ne fait pas qu’un brouhaha, elle… vous avez compris.

 

Pensez aussi à :
La source des bruits (machines, animaux, eau, vent, etc.) ;
Définir les bruits faibles (murmurer, bruisser, chuchoter, etc.) ;
Définir les bruits forts (tonner, gronder, tintamarre, etc.) ;
Dire l’évolution des bruits (naissent, montent, se répercute, etc.) ;
Donner leurs qualités (aigu, grave, cristallin, etc.).

Puisqu’on est dans l’écoute, savoir écouter tout est important :
Les banalités telles que « Les matins d’hiver sont froids ! » ; « En décembre les nuits sont courtes ! », etc.
Enregistrer ces truismes dans la vie courante vous évitera dans les commettre dans vos textes.
Vous croyez que j’exagère ? J’en ai vu en correction ! J’ai les noms, faites gaffe !

Enregistrez aussi les petites phrases rigolotes, les jeux de mots que vous entendez ici et là.
Dans « Paulo » j’écris par exemple : « il n’a pas inventé la poudre, ou alors elle lui a péter à la gueule ! » et encore « il n’y va pas de main morte avec le dos de la cuillère ! » Au risque de vous décevoir, ce n’est pas de moi, j’ai entendu ça quelque part. Pas dans un bar, je ne fréquente pas ce genre d’endroit…

L’oreille a un rôle important dans l’écriture.
« Quand j’écris, j’écoute. J’écoute chaque mot. Et quand je lis, c’est pareil. Tout ce que je lis, je l’entends. » (Nathalie Sarraute).
Comme elle avait raison la dame ! Il y a des textes harmonieux et d’autres qui arrachent les oreilles. L’harmonie d’un texte (points 4 des 6 principes fondamentaux), est pour beaucoup dans le rythme et les sonorités. Si vous ne voulez pas courir le risque de voir votre copine se barrer en courant, lisez votre texte intérieurement en le jouant comme un comédien. Mais si tel Flaubert vous avez à votre disposition un gueuloir, n’hésitez pas lisez-le à voix haute. Cet exercice permet de repérer : les cacophonies, les liaisons qui font saigner l’oreille, les dissonances, et… la mauvaise (ou l’absence de) ponctuation.

Ah… la ponctuation ! Pour corriger, parfois, nous aurions besoin d’un masque à oxygène. Au pire, si vous n’êtes pas certain des règles grammaticales de la ponctuation, placez vos virgules en fonction du souffle.
Pour le rythme, alternez des séquences courtes avec des plus longues. Et puis, évitez les tirets et les parenthèses. Ce sont des casseurs de rythme. Ils n’ont pas leur place dans la bonne littérature. Les tirets, parfois, d’accord, mais modérément. Mais les parenthèses… laissez cela aux journalistes, aux chroniqueurs, où à ceux qui sont suffisamment cossards pour ne pas chercher la tournure qui va bien !
Là encore, votre rythme sera meilleur si vous jetez vos idées sur le papier, parce que vous le ferez avec fluidité, sans vous interrompre pour je ne sais quelle cause informatique. C’est de cette façon que viendra naturellement votre style personnel.

2) La vue

Savoir voir (voici volontairement une belle cacophonie !), disons plutôt savoir observer. Notre regard, blasé par le quotidien, perd cette qualité au fil de l’âge. Là encore, il faut conserver son étonnement d’enfant, parce que bien retenir ce qui nous entoure nourrit l’imagination. L’auteur doit être curieux de tout, c’est indispensable. La curiosité dope l’imagination.

Personnellement, je dois m’entraîner pour réapprendre à observer. Par exemple, lorsque je suis assis peinard à la terrasse d’un café, devant un verre de lait, je ne regarde passer que les femmes âgées. Ainsi, n’étant pas attiré par leur anatomie, je détaille la façon dont elles sont vêtues. Et quelques temps plus tard, je tente sur le papier de décrire les braves dames. C’est un bon exercice, essayez-le. Personnellement, c’est au-dessus de mes forces et, hormis le fait que c’est vraiment un excellent exercice, il n’y a rien de vrai dans ce que vous venez de lire.
Il est vrai qu’on n’a pas l’habitude de regarder loin, en haut, en bas, d’en haut, de très près. Et pourtant c’est indispensable pour les descriptions.

On peut voir des : formes, ombres, mouvements, éclats, couleurs, dimensions, états, dispositions, etc.

3) Le goût

Hormis dans les livres de cuisine, c’est probablement le sens le moins utilisé en littérature. On peut utiliser les saveurs fondamentales : sucré, salé, amer, acide. Et les qualités : âpre, piquant, épicé, velouté, croquant, etc.

4) Le toucher

On peut utiliser les qualificatifs du chaud (brûlant, bouillant, tiède, etc.), du froid (glacé, gelé, frais, etc.) de l’agréable (soyeux, satiné, lisse, doux, etc.), du désagréable (râpeux, gluant, visqueux, etc.).

Dans quelles circonstances utiliser les sens ? Quand on est en panne, a dit Ephemere. Et bien c’est exactement ça ! Dans une description par exemple. Ce sera le thème de la prochaine chronique.

 

Voici un exemple :
« Dehors, la ville s’éveillait. Marie n’en percevait plus les bruits. Les sollicitations prolongées des démarreurs des moteurs mal réglés ; le claquement des portières ; le roulement des pneus sur l’asphalte ; le dévalement des attardés dans l’escalier ; les cris des enfants ; le grincement du rideau métallique du boucher, les cent bruits de son quartier auxquels s’ajoutaient ceux des autres, ces milliers de vibrations qui s’élèvent et constituent le fond sonore de la ville, témoignent de sa vie et font son âme, Marie ne les entendait pas. Elle dormait. »
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8 juillet 2009 3 08 /07 /juillet /2009 21:59

Trop de descriptions ennuient le lecteur. De bons dialogues, qui sonnent vrai, plaisent d’avantage, c’est un fait avéré. lorsque je choisis un livre, s’il n’est écrit que de longs paragraphes bien serrés, il faudra que la 4ème de couverture soit très convaincante pour que je ne le repose pas sur le présentoir. Si mon avis n’est pas suffisant, demandez à votre libraire !

Souvent, on a tendance à garder la parole en faisant tout dire par le narrateur : ce qu’il voit, ce qu’il entend, ce qu’il dit, ce qu’il pense. Ainsi, le lecteur n’a qu’un seul point de vue. La multiplication des points de vue par des personnages différents ajoute de l’attrait au récit. De plus, ils aèrent le texte s’ils sont sous forme de dialogues matérialisés par des tirets à la ligne.

Exemple :

- Les enfants, quels sont les trois principaux genres littéraires ?
- Le Lyrique ?
- Bien Pattie ! Le lyrique, dans lequel le romancier-narrateur garde égoïstement la parole.
- Oui m’sieur, j’ajouterais que dans le lyrique il y a la poésie, mais pas que…
- Oui, bon ça va, on ne va pas s’étendre !
- Oh si m’sieur ! Je veux bien m’étendre sur le sujet…
- Dehors Pattie ! Qui peut me donner un deuxième genre ?
- Le théâtre…
- Bravo André ! Le théâtre, qui n’est composé que de dialogues.
- Oui m’sieur, mais dans le dialogue théâtral la ponctuation à une importance capit…
- Ce n’est pas le sujet André ! Dehors !!!
- Quel est le troisième genre ? Personne ne sait ? Pat ?
- Le roman, m’sieur…
- Quand même ! Mademoiselle Pat se réveille ! Oui, la nouvelle et le roman qui sont un genre mixte, constitué de descriptions et de dialogues.
- J’aime bien la mixité, m’sieur. Si vous voyez ce que je veux dire…
- Petite perverse ! Dehors !!!

Donc une nouvelle est constituée de descriptions et de dialogues. Il faut des descriptions pour situer les actions, d’accord, mais elles ne sont pas naturelles. Il n’y a pas de description dans la vie courante, par contre, il y a énormément de dialogues. Le dialogue est naturel et fait vrai. Il faut donc l’utiliser au maximum. Pour cela, il faut faire se rencontrer des personnages et les faire dialoguer entre eux.
Mais les dialogues eux aussi doivent servir l’histoire. Par exemple, dans le dialogue ci-avant, le lecteur voit tout de suite que le professeur est un psychopathe grave !

Les dialogues ne sont intéressants que si les personnages ne sont pas d’accord. Si tous sont d’accord, la conversation tombe et l’intérêt du lecteur aussi. Par contre, s’ils ont des points de vue opposés, l’intérêt monte. C’est comme ça dans la vraie vie !
Par exemple, le dialogue aurait été beaucoup plus intéressant si Pattie, André et Pat avaient répondu au lieu de se laisser fiche dehors.
Je vous laisse l’imaginer…

Quelques points à réfléchir avant d’écrire un dialogue :
1) Quels rapports entretiennent les personnages entre eux ?
Sociaux : père, fils, patron, employé, etc.
De caractère : timide, vantard, menteur, etc.
De situation : Cordiaux, d’affection, de crainte, de méfiance, etc.

2) La longueur des répliques.
Il y a toujours un personnage qui parle le plus. Un bavard, un taiseux. Un qui veut des infos, un autre qui ne veut pas les donner. Un qui veut dominer, un autre qui semble soumis. Donc, évidemment, les répliques ne doivent pas être de même longueur.

3) le ton.
C’est peut-être le point clé d’un bon dialogue.
Changez de niveau de langage pour chaque interlocuteur. Chaque personnage doit parler comme on parle dans son milieu social. S’il s’agit d’un boucher sur un marché parisien, il ne dira pas : « je vous prie madame de me dire ce que vous désirez comme morceau », mais plutôt « J’vous l’met dans quoi votre steack ma p’tite dame ? » Pas plus que la dame en question ne répondra : « Dans le filet, peuchère » si elle est née à Paris dans le quartier de Belleville.

- J’ai un truc. Je ne sais pas si je vais vous le donner, bande de cancres !
- Si, si Togna, nous t’en prions à genoux, donnez-nous votre truc…
- Tes grave keumé, si tu veux pas nous l’refiler on va trouver un djèse ou te l’bébar.
- Si tu veux pas l’donner, garde-le, connard ! Ton truc, j’me l’met où j’pense !
- Cher Togna, se faire ainsi prier est d’un mauvais goût…
- Je m’en bats la race de son truc à ce bouffon !
- Si vous nous le donnez, nous prierons pour vous chaque soir pendant… un certain temps.
- Vraiment, ces enfants sont d’un vulgaire ! Ne cédez pas cher Togna…
- Mais, je n’ai pas l’intention de céder.
- Ta gueule ! Tu me l’donnes ton truc ou j’t’en colle une !
- Cet argument est frappant. Voilà, mais c’est bien parce que c’est vous.

Ce n’est pas vraiment « un truc », il suffit de supprimer les incises du type « dit Paul, demanda Jules, répliqua Jean ». Si malgré cela chaque voix est reconnaissable, si le lecteur comprend qui parle, votre dialogue sera peut-être bon. « Peut-être », parce que sa réussite dépend aussi de son contenu.
Ainsi, dans le dialogue ci-avant, combien reconnaît-on d’interlocuteurs ?

Il y en a cinq : une mère supérieure, un jeune d’une cité de banlieue, un vantard vulgaire, un ou une snob et mézigue. Si, dans le récit où est inclus ce dialogue j’ai nommé auparavant les personnages, le lecteur attentif (ah oui, on doit être attentif en lisant aussi, pas qu’en écrivant), les reconnaîtra sans peine.

Et puis ce n’est pas tout. Évitez le style trop « parlé ». Il ne faut pas s’évertuer à être vrai, mais plutôt à faire vrai.

Pour Oniris, en ce qui concerne la typo, respectez scrupuleusement la forme des dialogues ci-avant. Pas de « ». Pas d’espace AVANT le tiret. Un saut de ligne AVANT et APRÈS le dialogue.
Et puis, n’oubliez pas, la première lettre d’une incise de dialogue n’est jamais majuscule.
Ex :
- Ta gueule ! Tu me l’donnes ton truc ou j’t’en colle une ! dit Jules.

Règle typo n°2
Les points d’interrogations et d’exclamations doivent être solitaires ou aller par trois. JAMAIS par deux, ni par quatre ou plus.

Je vous en supplie, respectez cela si vous avez une once de compassion pour les correcteurs. Si vous n’avez pas de compassion… la mère supérieure vous infligera un châtiment corporel !

Les incises.Considérées comme une inélégance syntaxique jusqu’au 18ème siècle, elles sont largement utilisées dans le roman moderne.
Ainsi, les « dit-il » et autres « répondit-il » sont remplacés par des verbes qui s’associent facilement au fait de dire, tels que : murmurer, soupirer, hurler, confier, etc.
Même si je suis partisan d’en coller le moins possible en donnant suffisamment de personnalité au langage des locuteurs pour qu’ils soient aisément reconnus par le lecteur, ce n’est pas toujours possible (et puis ce n’est que ma vérité personnelle à moi qui n’est pas pour autant la bonne !). Il serait donc dommage de se priver de l’incise, car elle peut être un complément en ayant une incidence sur le discours indirect.

 

Pourtant, si elle survit aux raffinement de la mise en page du dialogue, il faut croire que l’incise a d’autres fonctions que celle d’aider à la reconnaissance de la parole d’autrui. Etant un petit morceau de narration introduit dans le discours direct (ses temps sont ceux du récit et non ceux du dialogue), elle insère les paroles dans le texte. Elle fait ainsi apparaître que le dialogue n’est pas autonome par rapport au récit.

Ainsi, elle peut avoir les fonctions différentes suivantes :
- Sans impliquer de jugement, être simplement informative en qualifiant la manière de dire : articuler, crier, hurler, murmurer, chuchoter, vociférer, débiter, dégoiser, bonir…
- Reconstituer l’action qui accompagne la parole : gémir, pleurer, sourire, regarder…
- Replacer la réplique dans la situation de communication : répondre, répliquer, rétorquer, répéter, transmettre, propager, objecter, faire observer…
- Être évaluative, elle infère alors un jugement en évoquant l’intention ou le sentiment qui accompagne la parole : féliciter, déplorer, reprocher, regretter…
- Porter un jugement sur la valeur de vérité du discours : prétendre, révéler, avouer, prouver, démontrer, dévoiler…

Alors, incises ou pas incises ? Les nouveaux romanciers ont mauvaise conscience à l’employer. Boris Vian, dans certains ouvrages, a pris le parti de n’utiliser que le verbe dire, au risque d’être monotone, mais il était Boris Vian… À vous de décider. Moi, qui suis un être équilibré, mesuré, raisonnable et sensé, je dirais que c’est comme la modestie, point trop n’en faut.

Dans un dialogue question-réponses, grâce à l’alternance, le lecteur sait qui prend la parole. On peut ici s’en passer.
Si on tient à les limiter, il peut y avoir une alternance entre répliques présentées avec incises et d’autres présentées sans. Là aussi le lecteur saura qui parle.
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8 juillet 2009 3 08 /07 /juillet /2009 21:58
La description(De décors, de paysages)Quand on débute dans cet art difficile mais combien passionnant, on a tendance à décrire comme ceci :
(L’auteur décrit la chambre d’une maison de retraite.)« Il était dans sa chambre. Je frappai et il me dit d’entrer. La chambre était petite mais agréable. Il y avait la télévision, une grande bibliothèque près de la fenêtre, un lit et une petite table de chevet sur laquelle il avait mis la photo de sa femme et celle de son fils. »

L’essentiel y est. Même si auparavant, l’auteur a précisé qu’il rend visite à un être cher, dont la santé est déclinante, dans une maison de retraite, il n’apprend pas grand-chose de plus au lecteur que ce à quoi on peut s’attendre à voir dans une telle chambre. La description n’est donc pas justifiée.

Si, par exemple, on transforme la description comme ceci :

« L’angoisse me saisit devant la porte de la chambre, je n’osai la pousser. Dans quel état allai-je le trouver ? L’inquiétude chassa l’anxiété, j’entrai. Je refermai la porte derrière moi pour le préserver des bruits du couloir. Immédiatement, l’odeur âcre de la dégénérescence finale m’alerta. On avait baissé un peu le volet. La pénombre rendait plus triste encore cette chambre médicalisée. Une bibliothèque, un fauteuil en cuir, les photos de son épouse et de son fils dressées sur la table de chevet, témoignaient encore de la vie. Pour combien de temps ? »

Là, le lecteur vit l’inquiétude du visiteur. Il sent l’odeur de la mort proche, entend les bruits caractéristiques d’un tel établissement. Il voit aussi la chambre sans que l’auteur ne l’ait vraiment décrite.

Donc, la première question à se poser est : à quoi sert cette description ? À quoi est-elle utile dans mon histoire ?

Un autre exemple d’une description terne, sans atmosphère :

« Le lieu était misérable et sale. La façade de l’immeuble était lézardée, les marches de bois de l’escalier usées, le lit creux, la table de nuit bancale, le lavabo jauni, la glace terne. Une ampoule, coiffée d’un abat-jour, pendait à un fil. Je n’avais pas prêté attention à cela, je n’avais pas vu cette misère, seule Mado m’importait. »

La même, en intégrant les pensées du personnage et l’atmosphère du lieu :

« Je n’avais pas remarqué, alors, la misère crasseuse de l’endroit. La façade sale et lézardée de l’immeuble ; l’escalier aux marches incertaines craquant sous mes pas ; le lit, creusé par mille étreintes sans amour ; la table de nuit triste de nudité ; le lavabo jauni, sa glace au tain passé par les yeux sans joie des filles ; l’ampoule, pendue à son fil, coiffée d’un abat-jour couleur chiure de mouches… Ce jour-là, tout cela, je ne l’avais pas vu. Plus que l’odeur âcre de la pauvreté, j’avais senti le parfum capiteux de Mado. »

Ici, le lecteur ressent la misérable et triste laideur de la chambre d’hôtel de passe. L’auteur raconte plus qu’il ne décrit. Il fait vivre sa description par le passé de certains objets, par l’ouïe (les marches craquant sous mes pas) et par les odeurs (l’odeur âcre de la pauvreté, le parfum capiteux).

Cette description est justifiée par les points suivants :
1) Elle montre, par ses détails caractéristiques, que le narrateur est déjà venu en ce lieu puisqu’il affirme : « Ce jour-là, tout cela, je ne l’avais pas vu. »
2) Elle indique au lecteur que le narrateur, subjugué par la femme qu’il désire, n’avait pas remarqué la misère.
3) Elle imprime dans l’esprit du lecteur un environnement de pauvreté utile à la suite du récit.

D’une façon générale, pour une description statique, prenons l’exemple d’une maison, il faut commencer par situer l’objet dans son décor, continuer par une analyse qui décompose l’objet en ses différents constituants (murs, toits, fenêtres, etc.), puis terminer en approfondissant l’impression du début et préparer l’enchaînement avec le reste de l’histoire (pour que la description serve à quelque chose).
Mais préférez les descriptions par scènes d’action et dialogues. C’est difficile, d’accord, mais vivant et jouissif à écrire !

Dorénavant et jusqu’à je ne sais pas quand, je donnerai une petite règle de typo en fin de chronique. Histoire de rappeler ce qui est mieux expliqué : ici ou
J’invite les nouveaux Oniriens (et certains moins nouveaux aussi, ils se reconnaîtront) à consulter sur le forum : « De la qualité des textes que vous soumettez » dans « les infos du site ». Vous y trouverez entre autres les liens ci-dessus.

Règle n°1 :
Il y a toujours un espace (avant et après) entre le mot et le point-virgule.
Il n’y a jamais d’espace avant la virgule (mais un, après).

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8 juillet 2009 3 08 /07 /juillet /2009 21:57

Saisir la pensée de l’auteur dès la première lecture… ne pas avoir à relire en se faisant des nœuds au cerveau pour comprendre le sens d’un paragraphe, voire d’une phrase… c’est ce que la plupart des lecteurs souhaitent, non ?

La lisibilité est le confort de lecture du lecteur.

Les trois facteurs principaux de la lisibilité sont :
Des mots lisibles, courts et courants ;
Des phrases courtes en moyenne ;
Des phrases de structure directe.

1) Des mots lisibles, courts et courants.
Les mots de 2 à 5 lettres favorisent la lisibilité. Les mots de 6 ou 7 lettres sont un handicape. Pourquoi ?
Première raison : parce que l’étroitesse de notre champ de vision (la fixation), nous permet de saisir plusieurs mots courts, mais qu’un seul mot long. Donc le sens qui est dans la relation entre mots apparaît moins.
Seconde raison : les mots courts sont aussi les plus usuels. Ils ont donc une chance d’appartenir déjà au vocabulaire du lecteur.

La majorité des gens, quand ils parlent, emploient des mots courts. Certains jeunes auteurs, pensent qu’il est bien plus « classe » d’utiliser des mots longs et rares (je l’ai fait aussi, une horreur…). C’est dommage pour la lisibilité, car :

- Les noms et les verbes, mots de base, sont mieux saisis que leurs dérivés (adjectif, adverbe, ou nom dérivé).
Ex :
Lire > lisible > lisibilité
Personnifié > personnification
Hugo > hugolien

- Les mots concrets sont mieux saisis que les mots abstraits parce qu’ils évoquent l’image.
Ex :
Roc > enrochement
Table > entablement
Esprit > entendement

- Les verbes et les noms qui expriment un mouvement sont mieux saisis que ceux qui décrivent un état statique.
Ex :
"La fosse était pleine de crocodiles en mouvement impatients de l’instant où Togna leur serait jeté en pâture pour avoir mis la main au missel de la mère supérieure."
"Des crocodiles rampaient dans la fosse, avides de viande, ils guettaient Togna qui allait leur être jeté pour avoir mis la main au missel de la mère supérieure."

Quelques règles pour être lisible :
Eviter les archaïsmes et les néologismes ;
Préférer les mots à racine latine, à ceux venant du grec ;
Préférer les mots français plutôt que les importations (ex : temps partagé plutôt que time-sharing) ;
Éviter les sigles, le jargon ou les abréviations peu courantes.

Les mots usuels sont mieux retenus parce que perçus plus vite.
De même, les mots qui ont une résonance affective assez forte sont mieux perçus.
Exemples de mots neutres : maison, table, tapis, lampe.
Exemples de mots affectifs : amour, baiser, désir, cancer, suicide, cadavre.

2) des phrases courtes en moyenne.

La capacité de notre mémoire à court terme en lecture est assez faible. En moyenne une quinzaine de mots. Il parait qu’on appelle ça un empan de lecture. Bizarre, parce qu’un empan, ancienne mesure, qui était la distance entre l’extrémité du pouce et celle de l’auriculaire lorsque la main est ouverte le plus possible, est largement supérieur à 15 cm, même pour une petite paluche !
Donc 15 mots, en moyenne, car cet empan varie selon le niveau socioculturel :
Niveau primaire : environ 10 à 12 mots.
Niveau secondaire : environ 15 à 18 mots.
Niveau supérieur : environ 22 à 28 mots.

Alors, dire phrases courtes en moyenne, signifie qu’une phrase longue peur être compensée par une courte pour que la moyenne reste au alentour de 15 mots, ce qui correspond aux lecteurs grand public. (Ainsi, les 3 premières phrases de ce paragraphe comportent respectivement : 13, 9 et 38 mots. Ce qui donne 20 mots en moyenne).

Voici un échantillon des longueurs moyennes des phrases de quelques auteurs français :

< 15 mots :
Duras = 13
Collection Harlequin = 13
Dard (San Antonio) = 12
Giono = 15
Giroud = 15
Simenon = 15
Villiers (SAS) = 14

> 15 < 30 :
Colette = 17
Flaubert = 18
Gide = 20
Rabelais = 28
Stendhal = 25
Valéry = 22
Yourcenar = 27

> 30 :
Bossuet = 28
Descartes = 74
Montaigne = 30
Proust = 38

Hors concours :
Céline : 206 !

En conclusion :

Certes, il faut nuancer dans l’application. Certains parmi nous souhaitent peut-être n’avoir essentiellement que des retours par l’élite intellectuel onirien. Pourquoi pas ? Dans ce cas, celui-ci ne fera probablement pas grief de la longueur de leurs phrases. Par contre, ceux qui comme moi apprennent à écrire dans l’espoir inavouable, mais réalisable parce qu’insensé, de voir leur ouvrage sur les rayons des librairies, feraient bien de réfléchir à la lisibilité. Parce que le nombre de livres vendus, pourrait être inversement proportionnel à la longueur de leurs phrases si elles excèdent en moyenne les 15 mots fatidiques.

3) Des phrases de structure directe.

La phrase la plus simple comprend dans l’ordre un sujet (groupe nominal), suivi d’un prédicat (groupe verbal) : « Le ciel // est bleu. »
Si on complexifie par augmentation des deux membres : « Le ciel / voilé / que l’on aperçoit / par-dessus / le toit / de l’église / dans le lointain / brumeux // présente / des reflets bleutés /sur fond / d’horizon doré /qui s’illumine / dans le soleil couchant. » (Ouf !)
De 4 mots, nous sommes passés à 34.
La difficulté de lecture vient de l’insertion de 18 mots entre le sujet (le ciel) et le verbe (présente).

Il paraît que cet « écran linguistique » est une forte gêne pour tous lecteurs de niveau inférieur au bac.
Euréka ! Je viens de comprendre pourquoi je n’aime ni Proust, ni Descartes, ni Céline… Je n’ai pas passé le Bac !

Si vous voulez augmenter la mauvaise lisibilité, faites des phrases « cascades » ou « récurrentes », c'est-à-dire celles qui répètent plusieurs fois la même tournure (de… de… de… ou : que… que… que…) Berk, berk, berk ! Là, c’est complet, le lecteur ne sait plus comment associer le sujet initial au prédicat qui se fait la paire de cascade en cascade.

Pour conclure ce sujet, voici deux trucs.
Un bon moyen de faire varier la longueur des phrases : les idées complexes nécessitent des phrases longues et complexes. Par contre, on peut traduire les idées simples par des phrases courtes (les idées courtes peuvent aussi être traduites par des phrases complexes… non, là, je déconne !)

Construire des phrases prédictives. C'est-à-dire dont le début laisse présager la suite. Elles sont moins monotones et soutiennent l’intérêt du lecteur.
Phrase non prédictive : "Le ciel est bleu / par-dessus le toit." (On pourrait s’arrêter à la barre).
Phrase prédictive : "Par-dessus le toit, / le ciel est bleu." (On ne peut pas s’arrêter ; on attend la suite).

Phrase non prédictive : "Des crocodiles guettaient Togna qui allait leur être jeté en pâture, il rampaient dans la fosse, avides de viande."
Phrase prédictive : "Dans la fosse, les crocodiles rampaient, avides de viande, guettant celui qui allait leur être jeté en pâture, ce Togna."

Et ce second truc, est essentiel à la bonne lisibilité. Proust, dont le score est de 38 mots par phrase, s’arrange la plupart du temps pour faire des phrases prédictives qui aident à la lecture.

Favoriser la lisibilité n’est pas un nivellement du style par le bas, car en la dosant, son utilité et l’élégance peuvent se rejoindre.

Bon, salut, j’ai mal au crâne, je vais prendre un petit adjuvant alcoolisé pour faire passer ça, oui mais l’alcool, me direz-vous, n’apaise pas les maux de tête, mais je m’en fou, puisque je serrai bourré je ne m’en apercevrai pas, et si Ulysse de la Margelle du Puits de la Noblerie (c’est mon chien) me fait une remarque désobligeante, je lui dirai qu’il s’occupe de ses puces. Non mais !

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8 juillet 2009 3 08 /07 /juillet /2009 21:53

Tenter de sortir d’un style académique est une marque de la personnalité de l’auteur, mais je crois cependant que certaines règles sont à conserver. Pourtant, l’utilisation des figures de styles est à utiliser avec parcimonie et surtout à bon escient. Car le premier homme qui a comparé une femme à une rose est un génie. Le second un imbécile ! (Zeugme).
Non Toto, Zeugme n’est pas le nom de l’auteur de cette déclaration, mais celui de sa figure de style !

On fait parfois des figures de style involontairement. Un peu comme monsieur Jourdain, etc. et c’est probablement les meilleures. Alors, créez-les. Car vous pouvez écrire, par exemple, au hasard : « Togna est un ours », bon je n’ai pas l’apparence d’un plantigrade, ça laisse donc supposer que je suis solitaire et sauvage ! Même si c’est vrai et que vous écrivez ça, excusez-moi, c’est une expression galvaudée, et ce n’est pas comme cela que vous allez améliorer votre style ! Et toc ! Et si, après vous être creusé une plombe le cigare vous écrivez : « Togna est un vieux lion perclus de rhumatismes », ben… ce n’est pas beaucoup mieux ! Par contre, avec ceci : « Togna chasserait Diogène de son tonneau pour prendre sa place ! » vous avez fait comprendre plus élégamment la même chose par une des figures de style les plus connues : la métaphore.

Pour ceux qui aiment les petites piquouses de rappel, voici les figures de style les plus courantes. Je ne donnerai pas toutes les définitions, cliquez sur « dictionnaire » dans vos favoris !

Quatre familles de figures

1) Les figures de son :

- L’allitération, répétition de la même consonne.
« Pour qui Sont ces Serpents qui Sifflent sur nos têtes »

- L’assonance, répétition de la même voyelle.
« Les sanglots longs des violons de l’automne bercent mon cœur d’une langueur monotone »

- La rime, je passe.

- La paronomase, deux mots voisins rassemblés.
« Qui vivra, verra »

- L’élision, je passe.

-L’antanaclase,
« Cinq gars pour Singapour » (Jean Bruce)
J’aime bien.

2) Les figures de mots :

Elles comprennent les métaphores et les métonymies.

Les métaphores ou images par ressemblance
- La comparaison : Togna est sauvage comme un ours.
- La métaphore : Togna est un ours (l’idée de sauvagerie n’est plus que sous-entendue).
- L’allégorie : métaphore amplifiée, « Un phénix » pour celui qui est unique en son genre.
- La catachrèse : Le bec d’une plume, le nez de l’avion.

Comme Audiard, vous pouvez faire dans la nuance :
« Attention ! J’ai le glaive vengeur et le bras séculier ! L’aigle va fondre sur la vieille buse ! Un peu chouette comme métaphore, non ?
- C’est pas une métaphore, c’est une périphrase.
- Fais pas chier !
- Ça c’est une métaphore. »

Les métonymies ou images par relation de proximité
- une partie pour un tout : « une voile » pour un bateau.
- le contenu pour le contenant : « boire un verre ».
- la cause pour l’effet : « la plume » d’un écrivain (pour son écriture).
Il y en a d’autres, cherchez « la matière pour l’objet », « la région pour le produit », etc.

Les figures syntaxiques

Elles modifient la phrase.

- L’ellipse. Suppression volontaire d’un mot : « Soudain, le ballon en l’air ». Le verbe « fut projeté » a disparu pour rendre l’événement plus soudain.
- Le zeugme est une double ellipse. On ne répète pas dans le second membre de la phrase les mots déjà cités. « Demain, je lirai le numéro 2 de SLCLM (Pour les nouveaux, il s’agit de Sous Le Clavier Les Pages, l’excellent journal d’une équipe fracassante d’oniriens allumés et fumants que vous trouverez sousleclavierlespages03.pdf), après demain le numéro" 3 (« je lirai » non répété).
- L’oxymore. Deux mots incompatibles, voire opposés, accolés. « Cette obscure clarté », « cette petite grande âme », etc.
- L’inversion. « Restait la formidable puissance de frappe de Nico ». Verbe placé en tête à effet d’insistance.
- L’énumération.
Ascendante : « Choisis, lis, apprécie et commente ma nouvelle ».
Descendante : « Mon inspiration pâlit, s’étiole et meurt ».
- La périphrase. Remplace un mot par un groupe de mots. « Le plus clair de notre temps » pour « Oniris ».


Les figures de pensée

Elles portent sur la pensée elle-même avant toute matérialisation en mots précis.

Minoratives :

- La litote. Dire peu pour exprimer beaucoup : « Oniris, je ne te hais point » pour dire : « Je t’aime, je t’adore, la vie sans toi ne vaut pas tripette, tu es le phare de mes errances littéraires, etc. »
- L’euphémisme. Remplace un mot trop direct par un plus doux : « Cette chronique n’est pas passionnante » pour dire « cette chronique est vraiment assommante ! »

Figures exagératrices :

- L’hyperbole. Exagération de la pensée outrepassant la réalité : « La centrale était couverte du sang des correcteurs ».
- l’antiphrase ou l’ironie. Dire blanc pour laisser entendre noir (ou l’inverse) : « Qu’il est sympa cet onirien ! » à l’adresse d’un commentateur odieux. « Simple supposition de ma part, il ne saurait y en avoir ici ! » (Ironie).
- La répétition ou insistance : « je l’ai vu, de mes yeux vu, vu ce qui s’appelle vu » (Momo)

J’ai bien révisé, moi ! Je vous remercie de m’en avoir donné l’occasion.

Je me permets de dire à nouveau que ces figures sont canons quand elles sont nouvelles, mais sont le bide assuré quand elles sont usées. Ne répétez pas, inventez !

Pour conclure avec le style, il ne suffit pas de savoir manipuler ce que nous avons vu précédemment pour en avoir un. Ce serait trop simple et… pas drôle. Comme le fait remarquer si justement Cyberalx dans son exercice d’écriture (forum atelier d’écriture – exercice n°1), il faut : « Sortir (la vraie vie n’est pas dans les livres, même si elle y apparaît en filigrane. Vous couper du reste du monde ne fera que vous couper de la réalité qui est indispensable à tout bon récit - même Fantastique ! – qui se respecte).
Observer et noter (beaucoup, souvent et n’importe quoi ou qui). »

La technique ne construit que l’apparence de l’écriture, l’expérience en fait le fond. Comme eut dit le bon monsieur De Lapalisse, ou l’excellent Pierre Dac : « pour dire quelque chose, il faut avoir quelque chose à dire. »

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8 juillet 2009 3 08 /07 /juillet /2009 21:50

Nous avons vu précédemment : l’imagination, la description, les sens, les dialogues, la lisibilité, la ponctuation. On pourrait approfondir encore chacune de ces rubriques, tout n’a pas été dit, si tant est que l’on puisse épuiser chaque sujet ! Comme je vois que vous fatiguez, je vais passer à quelque chose de plus ludique. Mais vous n’allez pas vous en tirer comme ça, j’y reviendrai, et peut-être même dans ce qui va suivre. Car je vais tenter de vous donner quelques tuyaux sur un thème qui a fait et fera user encore les claviers sur le forum, j’ai nommé… the style !

La vache ! Ça vous remue le grand zegomar le style ! J’en vois certains qui tentent d’en posséder un avant même de savoir écrire correctement… c’est normal, puisque le style c’est… c’est quoi au fait ?
Vous en aurez vraiment un lorsque les publicateurs se diront sans avoir pris connaissance de votre pseudo : « c’est Untel qui a écrit ça ! ». J’exagère à peine. Le style, c’est la signature de l’auteur. C’est en quoi il n’écrit pas pareil que les autres, au point qu’on le remarque.

Comment y parvenir ? Pour commencer et faire simple, il y a deux actions possibles : le vocabulaire et la syntaxe.

1) le vocabulaire.
Choisir les mots expressifs et savoir les doser.

Le texte est fait de noms, de verbes, d’adjectifs, d’adverbes qui précisent le verbe, de déterminants qui précisent le nom (un arbre - l’arbre - les arbres), de prépositions et conjonctions. Ces deux dernières ne sont pas des mots sémantiques mais syntaxiques. Contrairement aux autres mots, ils ne signifient rien en eux-mêmes, ils prennent leur sens en reliant les mots entre eux. Comme le ciment assemble les parpaings.
Normalement, quand nous écrivons, tous ces mots nous viennent spontanément. Bien sûr Togna ! C’est évident, nous ne sommes pas illettrés ! me dites-vous. Certes, mais un des secrets du style consiste à doser volontairement leur proportion pour provoquer un certain effet sur le lecteur », vous réponds-je. Ça vous la coupe ça, hein ?

Il semble que les proportions courantes soient :
Les noms : 30/100 (sujets et compléments)
Les verbes : 20/100
Les adjectifs : 10/100
Les 40/100 restants représentent les autres mots.

Supposez que vous vous vouliez donner un caractère miséreux à votre récit. Au hasard, la description d’un taudis, par exemple. Vous allez donc décrire et qualifier. Comment ? En augmentant la dose d’adjectifs lourdement suggestifs : abject, sale, fétide, infect, sordide, obscure, ténébreux, ignoble, dégueu, etc. Victor (nous sommes très intimes, lui et moi), pour cette raison, approche les 30/100 d’adjectifs dans « Les Misérables ».

Dans les récits d’aventures, où l’action est prépondérante, quels types de mots devront être augmentés ? Les insultes ? Non, pas les insultes, abruti ! Les verbes ! Les scènes d’action demandent par définition du dynamisme et du mouvement. Les verbes sont parfaits pour ça.

Si vous inclinez vers la philo, si, y en a, j’en ai vu des oniriens comme ça ! J’évite de participer à la correction de leurs textes, ça me coûte une boite d’aspro à chaque fois ! Si donc vous philosophez, privilégiez les noms. L’abondance de noms crée une distanciation par rapport au concret en marquant l’intellectualisation.

Comme toujours, gardons-nous d’abuser en usant systématiquement de ce principe. Chez les auteurs confirmés, on s’aperçoit que la proportion noms/verbes/adjectifs est assez équilibrée et qu’ils créent volontairement un déséquilibre pour aller ponctuellement vers un but visé.

Nous utilisons tous abondamment et inconsciemment, qui du verbe, qui de l’adjectif, qui du nom et d’autres termes encore. Puisque maîtriser son style c’est entre autres maîtriser le dosage, il faut se connaître pour se corriger. Prenez trois marqueurs de couleurs différentes et coloriez un de vos textes, tirez la conclusion.

Le défaut le plus courant est l’abondance d’adjectifs décoratifs du type : ciel lourd, nuages gris, vertes prairies, clairs ruisseaux, etc.
À la relecture, virez la moitié de ces adjectifs trop convenus et pour l’autre moitié, cherchez un verbe ou un nom plus précis (tiens, on reparle de la précision du vocabulaire) :
Exemples :
Le ciel noir > le ciel s’assombrit.
Une maison délabrée > une masure.
Un type prétentieux et vaniteux > un crâneur > un Togna.
Une fille antipathique > une pimbêche.

Mais généralement, pour éviter la monotonie (de laquelle, tout comme de la routine, naît l’ennui), faites supporter l’idée principale par un verbe d’action. Les noms et les adjectifs sont statiques. Ils décrivent des états et non des actions. Le bon style se construit à l’aide de verbes et de verbes précis d’action. La proportion d’adjectifs doit restée modérée, sauf exception motivée.

C’est tout pour cette fois, mais on n’a pas fini avec le style…

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